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peest uneAu Burkina Faso, le secteur agricole a une place prépondérante dans l’économie nationale car il occupe 80% de la population active et contribue pour environ 35 % à la formation du PIB. Pour faire face aux pertes de rendement dues aux ennemis des cultures (maladies et mauvaises herbes), les producteurs ont recours à la lutte chimique par l’utilisation de pesticides. Une pratique qui gagne du terrain. Toutefois, les êtres humains et les animaux, l'environnement ainsi que le sol sont exposés aux menaces de l'usage abusif des herbicides.  Radars Info Burkina est allé dans des champs et des services à la rencontre des acteurs.

En cette matinée du samedi 17 août 2019, nous nous rendons dans la commune de Loumbila, située à quelques kilomètres de Ouagadougou. C’est la verdure un peu partout. Les paysans sont en train de cultiver : certains dans des champs de maïs, d’autres dans des champs d’arachide. Nous arrivons aux alentours du barrage, où est pratiquée la culture maraîchère. Salif  Kaboré est en train de planter des tomates à proximité de son champ de maïs. Il pratique le jardinage il y a maintenant 10 ans. C’est à partir de la saison agricole de l’année dernière qu’il a commencé l’utilisation  des herbicides pour la culture du maïs. «Cette saison 2019, avant de semer le maïs, je vais chez les commerçants de produits phytosanitaires pour me procurer un demi-litre d’herbicide. J’ai mélangé le produit acheté à 10 litres d’eau avant la pulvérisation. Je ne connais pas son nom mais il a vraiment détruit l’herbe», indique-t-il.

peest 2A l’en croire, il a utilisé des gants et un cache-nez comme équipements de protection lors de la pulvérisation. La bouteille vide, il l’a laissée dans la nature.

Plus loin, nous trouvons Rasmané Ouédraogo, un jardinier occupé à arroser  une  pépinière d’oignons. A quelques mètres de la  pépinière, nous constatons une portion où l’herbe a complètement brûlé. Il en est l’auteur. Il a utilisé il y a 4 jours un herbicide qu’il appelle «minute»  pour détruire l’herbe à ce niveau avant le labour afin d’y cultiver des oignons.

«Au lieu de perdre plusieurs  semaines à désherber à la main, depuis maintenant trois ans j’ai recours aux herbicides. Avec ces produits, en une journée tu peux détruire les hautes herbes et commencer le travail de labour le lendemain», affirme-t-il.

C’est sur le marché qu’il se procure ces produits qu’il  appelle «minute» et «semaine» selon le degré d’efficacité de chacun d’eux. La bouteille « minute » posée sous un arbre porte une étiquette en anglais. Le nom du produit est Gramoquat Super. Son prix est de 2 400F. Quant à la bouteille « semaine », elle arbore aussi une étiquette en anglais avec pour nom Harmful. Rasmané Ouédraogo nous montre l’emballage d’un troisième produit. L’écriture est en français et le produit porte le nom Glyphader 75.

Les bouteilles et les emballages vides sont abandonnés  à côté d’une pompe à motricité humaine. «Je ne connais aucune mesure dans le mélange des produits avec l’eau. Je sais seulement qu’un litre d’herbicide, c’est pour un hectare. Quand je pulvérise,  je n’utilise pas de protection », confie-t-il.

peest 3Selon René Sanou, ingénieur  agronome et chef du service Pesticides au ministère de l’Agriculture, les paysans burkinabè s’adonnent à une utilisation abusive des herbicides ces dernières années. Or, 50% de ces herbicides utilisés ne sont pas autorisés à cause de leur toxicité pour l’environnement. Les plus utilisés sont les herbicides  à base de glyphosate.

Les herbicides arrivent au Burkina Faso officiellement par la voie de l’importation. Mais une quantité importante d’herbicides non homologués par le Comité sahélien des pesticides, dont le Burkina Faso est membre, entrent au pays frauduleusement. Les produits dont les étiquettes sont en anglais sont généralement non homologués par ledit Comité. Quant aux herbicides à base de glyphosate, interdits dans plusieurs pays occidentaux pour des raisons de santé publique, ils sont homologués par le Comité sahélien.

Les êtres humains et les animaux, l'environnement de même que le sol sont exposés aux menaces de l'usage abusif des herbicides. Selon les résultats d’une étude, les pays en développement utilisent environ 25% des pesticides dans le monde, mais jusqu’à 99% des décès dans lesdits pays sont liés à ces pesticides. Les herbicides peuvent être jusqu'à dix fois plus toxiques pour les enfants que pour les adultes et les effets de leur exposition peuvent inclure des malformations congénitales, des cancers, des problèmes de développement neurologique et des problèmes hormonaux.

Il est donc primordial d'améliorer les connaissances sur l'utilisation sans danger des herbicides par les paysans à travers la sensibilisation. De plus, la mécanisation continue de l’agriculture pourrait être une alternative.

Aly Tinto (Stagiaire)