Championnat burkinabè de D1 : «Tant que les joueurs ne seront pas dans de bonnes conditions, on ne pourra pas espérer un meilleur rendement », Julien Tiendrébéogo, spécialiste de l’économie du sport
La question de la rémunération des joueurs du championnat de première division du Burkina est intimement liée à sa professionnalisation. Pour passer ce cap, il faut que les clubs, en plus de l’aide de l’Etat, aient d’autres sources de revenus. Cette thèse est de Julien Tiendrébéogo, spécialiste de l’économie du sport, que Radar Info Burkina a eu en entretien.
Radars Burkina : Quelle appréciation faites-vous du championnat burkinabè de première division ?
Julien Tiendrébéogo : « Il faut dire que le championnat burkinabè est toujours d’un niveau amateur. Cela s’explique à plusieurs niveaux. Il y a le niveau ou le barème de rémunération des joueurs, la qualité des clubs en compétition africaine, le statut des clubs, leur niveau d’organisation. Tout compte fait, c’est un championnat en pleine mutation. La ligue professionnelle de football burkinabè s’est dotée de textes pour permettre une bonne organisation du championnat. Mais avec l’arrivée de certains clubs comme SALITAS FC, RAHIMO, KOZAF, MAJESTIC, le visage du championnat a changé et s’améliore ».
RB : Quel impact financier l’augmentation du nombre d’équipes aura-t-elle aussi bien à la FBF qu’au ministère des Sports ?
JT : « Déjà en matière de subvention, il faut savoir que chaque club de D1 a droit a 15 millions et 20 millions pour la bourse. Il y a aussi que la Fédération burkinabè de Football (FBF) s’occupe des charges d’organisation des matchs. Il faut donc ajouter 35 millions de francs CFA, deux fois en plus des charges. Etre en D1 a beaucoup d’exigences économiques et financières. La question des moyens se posera aux nouveaux qui montent en D1. On constate aussi qu’il y a plusieurs clubs de D1 qui traînent plusieurs arriérés de salaires, ce qui n’est pas bon pour l’image de notre championnat. Ailleurs si vous avez des difficultés à tenir vos engagements financiers, cela peut être source de relégation pour vous».
RD : Est-ce que dans le contexte actuel du Burkina Faso il est possible de dépasser ce barème salarial ?
JT : Je dirais qu’il est quand même difficile de dépasser ce cap. Tant que les clubs n’auront pas d’autres sources de revenus que celles de l’Etat, ils ne pourront pas payer plus que ce qu’ils payent actuellement. La convention à ce niveau au Burkina Faso dit qu’en D1, on ne doit pas payer moins de 50 000 francs CFA, et pour la D2 c’est pas moins de 30 000 francs CFA. Avec 50 000 francs CFA, est-ce qu’un joueur peut s’offrir une alimentation digne d’un compétiteur, payer son loyer, ses factures et se vêtir ? On ne pourra pas passer ce cap tant que le championnat sera toujours amateur. Il faut un processus de transformation structurelle qui va nécessiter des acteurs de qualité, un cadre législatif adapté à notre contexte et un environnement favorable. Seuls les clubs qui arrivent à vendre des joueurs à l’extérieur et qui ont des sponsors peuvent le faire. Il faut aussi que les clubs créent des initiatives. Par exemple les clubs n’ont pas de chargé de marketing, c’est-à-dire des gens chargés d’aller chercher des partenaires pour pouvoir renflouer leurs caisses. Ça m’étonnerait que dans l’immédiat, les clubs puissent changer la situation salariale de leurs joueurs. Tant que les joueurs ne seront pas dans de bonnes conditions, on ne pourra pas espérer un meilleur rendement ».
Obissa